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Ken Wallis s'entretient avec l'artiste de blues canadien, Little Magic Sam

  • Photo du rédacteur: Ken Wallis
    Ken Wallis
  • 25 juil.
  • 10 min de lecture
Little Magic Sam


Little Magic Sam et son groupe de musiciens chevronnés proposent un mélange enflammé de blues contemporain et traditionnel.C’est un véritable plaisir de voir ce groupe en concert, car la qualité musicale, du début à la fin, crée un lien profond avec le public.


En 2024, The Little Magic Sam Band a remporté un Maple Blues Award dans la catégorie Nouvel artiste ou groupe de l’année, une preuve supplémentaire que le ciel du blues est sans limite pour un groupe qui rend hommage aux artistes du passé tout en proposant un répertoire original.


Ken Wallis a interviewé Little Magic Sam pour l’émission de radio BluesSource Canada.Voici quelques extraits de cette entrevue, édités et abrégés pour plus de clarté et de concision.



Little Magic Sam

Ken WallisL

ittle Magic Sam vient de sortir un tout nouvel album intitulé Live At The Rivoli. Et il est avec nous aujourd’hui. Ravi de te revoir, Sam.


Little Magic SamH

é, ravi de te revoir aussi.


Ken Wallis

Super album, mais d’abord, revenons un peu en arrière. Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire de la musique à l’origine ?


Little Magic Sam

Alors là, ça remonte à très loin. J’avais six ou sept ans, et à l’époque j’étais vraiment passionné de basketball et de sport. La musique n’était pas quelque chose d’important pour moi, sauf quand je faisais des lancers au panier en écoutant un CD. Puis je suis tombé très malade. J’ai eu un virus au rein qui m’a mis complètement à plat pendant environ deux ans, au point que je ne pouvais plus aller à l’école.


Je ne pouvais plus jouer au basketball. Je ne pouvais même plus sortir de mon lit. C’était un truc constant : je faisais des allers-retours à l’hôpital pour enfants plusieurs fois par semaine. Et honnêtement, ça a détruit tout mon petit monde, parce que quand on est enfant, jouer dehors à la récré avec ses copains, c’est tout. Soudainement, j’ai heurté un mur. Je ne pouvais plus rien faire de tout ça. Quand on est gosse, on ne comprend pas vraiment ce qui se passe sur le plan médical, et mes parents étaient évidemment très inquiets.


Je m’ennuyais tellement que ma tante m’a apporté un petit clavier que je pouvais poser sur mes genoux pendant que j’étais allongé. Le film Titanic venait de sortir, et je me souviens avoir entendu My Heart Will Go On. C’est une chanson bien écrite, et un énorme succès. J’ai commencé à jouer cette chanson sur le clavier, puis à essayer de trouver d’autres mélodies. Je bidouillais jusqu’à ce que ça sonne à peu près bien, et que ça commence à ressembler à quelque chose. Ma sœur prenait des cours de piano. Elle a trois ans de plus que moi. Et bien sûr, quand on est plus jeune, on admire ses grands frères ou sœurs, on se dit : « Si elle le fait, moi aussi je veux le faire. »


Dès que j’ai commencé à aller mieux, je jouais dans ma chambre, j’essayais de faire correspondre ma voix aux notes. Ma sœur a aussi pris des cours de chant, alors dès que j’ai pu, j’en ai pris moi aussi. J’ai essayé de tout apprendre à l’oreille, en explorant jusqu’à ce que je trouve quelque chose d’intéressant.


Finalement, j’ai participé à un concours de talents à l’école, je crois, et j’ai chanté My Heart Will Go On. J’avais une bande-son, je l’ai chantée, et ma famille m’a dit : « Tu tiens peut-être quelque chose. Si ça te fait du bien, et que tu arrives à créer quelque chose, ça pourrait durer longtemps si tu continues dans cette voie. » Ils m’ont encouragé à continuer à travailler et à prendre des cours. Mes grands-parents ont eu une grande influence. Ils adoraient le Rat Pack, tous les standards. Ils écoutaient Frank Sinatra en boucle.


Mes premières prestations étaient dans des maisons de retraite, et ce public-là adorait ces vieux standards. Alors ma famille m’a un peu poussé dans cette direction, et ça m’a semblé naturel. Cette musique était intemporelle. Peu importait mon âge ou celui de la chanson. Il y avait quelque chose dans les arrangements, les paroles, la production… Je trouvais ça classe, authentique. C’était différent, et évidemment, aucun de mes amis n’écoutait ça, donc personne ne me comprenait. J’ai été beaucoup harcelé à l’école, mais je continuais d’apprendre de plus en plus de morceaux du Great American Songbook.


Quelqu’un me faisait des CD de karaoké avec les accompagnements, et j’allais chanter dans des événements privés, des fêtes, des maisons de retraite, tout un tas d’endroits, avec ces vieux standards. J’ai commencé à prendre des cours de chant plus avancés. Et puis j’ai commencé à jouer avec des combos jazz, de vrais musiciens, en live. Ça a tout changé. J’ai fait ça jusqu’à environ mes quatorze ans. Mes parents ont été formidables.


Ce n’étaient pas des « parents managers » oppressants, mais ils me conduisaient partout, s’assuraient que tout le matériel était prêt. Ils ont joué le rôle de manager pendant un temps. Je chantais parfois cinq ou six fois par semaine, parfois plusieurs concerts par jour.


Mes profs étaient super, mais j’ai manqué énormément l’école. Ils s’assuraient toujours que je rattrape, mais oui, j’ai raté beaucoup de cours. J’ai voyagé à travers tout le Canada, et parfois aux États-Unis. J’ai même chanté dans l’émission The Jenny Jones Show à neuf ans, en interprétant Frank Sinatra. Ça m’a mené dans des endroits incroyables. Mais vers treize ou quatorze ans, j’ai réalisé que le chant seul n’était plus tenable. Avec la puberté, tout a changé. Je me souviens d’un concert où ma voix a craqué pour la première fois. J’étais mort de honte. J’ai dit à mes parents : « C’est fini. Je ne peux plus faire ça. »


Comme tentative de dernière chance, ils m’ont offert une guitare électrique à Noël. Je n’étais pas vraiment fan de ce genre de musique à la base, mais mon père avait une collection de disques avec les Beatles, Led Zeppelin et Jimi Hendrix. Et Jimi Hendrix avait une Stratocaster, exactement comme la copie de Strat qu’on m’avait offerte.


Et là, tout a basculé. J’ai délaissé le jazz et les standards, et je suis devenu un ado typique de 14 ou 15 ans avec une guitare électrique. Je jouais de tout : Black Sabbath, ACDC… À 16 ans, mon père m’a emmené en road trip jusqu’à Nashville. Je suis tombé sur un CD de B.B. King dans un magasin de disques. J’ai dit : « B.B. King a un club ici à Nashville, ce serait cool de voir ça. » Le CD, c’était Live At The Regal. Mon père et moi, on l’a écouté en boucle tout au long du voyage aller-retour. Et là, c’était fini : j’étais mordu de blues.


J’ai compris que la guitare pouvait devenir un tout autre moyen d’expression pour moi. Je pouvais utiliser mon bagage jazz pour l’appliquer au blues, et tout a commencé à changer. Colin James & The Little Big Band — c’était la fusion parfaite pour moi, ce mélange du swing et du son de la guitare blues. Ça m’a soufflé. Du coup, je voulais même qu’on m’appelle James !


Little Magic Sam

Ken Wallis

Dis-moi, d’où vient ton surnom « Little Magic » ?


Little Magic Sam

C’est un peu venu de deux choses. Je suis allé plusieurs fois à La Nouvelle-Orléans, et j’y ai vu Little Freddie King. Il m’a tout de suite intrigué parce qu’au début, je pensais que c’était un hommage à Freddie King. À ma connaissance, il n’a aucun lien avec Freddie King, le « Texas Cannonball ». Mais il s’appelle Freddie, il joue sur une grosse Gibson rouge cerise, comme Freddie King. J’ai trouvé ça génial : il reprenait certains codes de Freddie, mais son son à lui était complètement différent.


J’ai aussi toujours adoré Magic Sam. Pour moi, sa voix ressortait vraiment du lot parmi les musiciens de Blues. Il avait une qualité vocale qu’on ne peut pas imiter. C’est un son presque hanté, et il avait un style de blues beaucoup plus doux et mélodique, très différent de beaucoup d’autres blues électriques.


Alors je me suis dit : si Little Freddie King n’est pas apparenté à Freddie King mais s’inspire de lui, pourquoi pas moi ? J’ai proposé Little Magic Sam à mon groupe de l’époque. La moitié a trouvé ça sympa, l’autre moitié a dit : « Pourquoi t’appeler comme ça ? T’es pas un magicien, ni un gamin. »


C’est vrai qu’au début, beaucoup me prenaient pour un magicien. Mais c’est comme ça que le nom est né. Je ne cherche pas à faire un hommage ou un groupe de reprises de Magic Sam, mais j’adore son influence, et ce nom m’est resté. C’était une façon de rendre hommage à ceux que j’admire et que j’écoute.


Ken Wallis

Alors Sam, où a été enregistré ton album live ?


Little Magic Sam

Dans un lieu emblématique de Toronto : le Rivoli. Ce bâtiment a été pas mal de choses au fil des ans. Il est situé à Queen et Spadina, pas loin du Horseshoe Tavern. Il a été construit vers 1911, je crois. C’est un de ces magnifiques vieux bâtiments de Toronto qui n’a pas encore été démoli.


Toronto adore garder juste la façade et transformer le reste en condos ou en boutiques. Mais le Rivoli est encore là, intact. À l’origine, c’était un cinéma muet, un des premiers au Canada. Ensuite, ça a été un théâtre de vaudeville. Le bâtiment a toujours eu un lien fort avec les arts et la culture. Puis il est resté fermé pendant des années, jusqu’à la fin des années 70 ou début 80. Là, son histoire a pris un nouveau tournant : c’est devenu un haut lieu de la scène comique et musicale canadienne. Mike Myers y a été découvert. Les Kids In The Hall aussi. C’est là qu’ils ont commencé, qu’ils ont été repérés. Lorne Michaels, le producteur du Saturday Night Live, faisait ses auditions au Rivoli.


Le rez-de-chaussée est une grande salle, presque comme une caverne. L’acoustique y est géniale, avec un super bar et une excellente cuisine. Mais ce qui m’intéressait, c’était l’étage, le vieux salon de billard. Quand j’ai emménagé à Toronto, on y fêtait des anniversaires. C’est un endroit rétro, quasiment inchangé depuis 50 ans, voire plus. Hauts plafonds, fenêtres à carreaux… On n’imaginerait pas que c’est un bon endroit pour enregistrer, mais avec la bonne personne à la console, la pièce devient un instrument en soi. Je me suis dit : « Ce serait dommage de ne rien faire ici. » Et puis on a fini par avoir un concert là-bas, tous les deux dimanches l’automne dernier, et on s’est dit qu’on voulait enregistrer un live.


Le barman de l’étage, Damon Lineback, est aussi un ingé son de haut niveau. Un des meilleurs au Canada. Il a été tech guitare et son live pour plusieurs groupes, dont Big Sugar. Et ce gars-là est un magicien de l’analogique, passionné de matos vintage comme nous. Il avait envie d’essayer des choses. Il nous a dit : « Je cherche le bon groupe pour enregistrer ici. »


Le lieu a même un vieux piano droit, pas tout à fait accordé – parfait pour notre son. Tout s’est aligné. Damon est arrivé avec son matériel, un setup mobile génial, et des micros vintage des années 50-60, le genre qu’utilisait Muddy Waters.


Il a dit : « Si on peut tout installer ici et capter quelques sets, on pourra choisir les meilleurs morceaux. » Mais d’abord, il fallait remplir la salle. Et on y est arrivé : elle était bondée. Des gens ont fait des heures de route. On était très reconnaissants. On savait qu’on n’aurait qu’une seule chance.


L’album contient 10 morceaux originaux, tous joués live. Aucun overdub, aucun réenregistrement, aucune prise alternative. Ce que vous entendez, c’est exactement ce qu’il s’est passé ce jour-là. L’idée, c’était de plonger l’auditeur dans le bar, comme s’il y était, assis à une table. Je m’étais inspiré d’Oscar Peterson Live at the Town Tavern, enregistré à Toronto dans les années 50. C’est intemporel. On entend les verres, les commandes, l’ambiance. J’ai voulu recréer ça.


Je suis vraiment fier du résultat. Le groupe a été formidable. Ils ont tout réussi du premier coup, à chaque fois.


Ken Wallis

Dis-nous qui sont les membres du groupe.


Little Magic Sam

Alors, il y a ma femme Maia Van Raes au piano. Steve Grant à l’harmonica – on l’appelle « Cabbagetown Steve », une légende de Toronto. À la basse, Drew Danko, dont l’oncle était Rick Danko de The Band. Drew a une sensibilité incroyable pour cette musique, bien au-delà de son âge. Il est plus jeune que nous, mais c’est un vrai musicien. Et à la batterie, Ben Graffam. Il joue aussi pour Jade Blues et pour un groupe de jazz fusion appelé Tenshi. Ben est, selon moi, l’un des meilleurs batteurs au Canada. Il peut tout faire, même sous la neige ! Le groupe fonctionne comme une famille, un vrai bloc uni. Sur scène, il n’y a pas d’individualités : on ne fait qu’un son. C’est ce que j’ai toujours voulu.


Ken Wallis

Oui, tout s’enchaîne parfaitement. Ta voix, la guitare, tout se fond. Et alors l’harmonica… wow. C’est bluffant.


Little Magic Sam

Steve, c’est le vrai de vrai. Il vient d’un milieu très modeste. Il n’a pas eu une vie facile, et ça se sent dans son jeu. Il dégage une joie incroyable quand il joue. C’est communicatif. Dès qu’on l’entend, on le comprend. On a l’impression de le connaître depuis toujours.

C’est aussi l’un des mecs les plus gentils au monde. Il a grandi en achetant des disques de Blues. Il a vu des légendes : il a joué avec Buddy Guy et Junior Wells, vu Albert Collins plusieurs fois, Stevie Wonder… Il est une vraie encyclopédie du Blues et du R&B. C’est une ressource inestimable.


Ken Wallis

La première fois que j’ai mis ton album, je me suis assis et j’ai écouté du premier au dernier morceau. Et je l’ai remis tout de suite après. Je t’ai aussi vu en live – c’est incroyable. Tu es en pleine ascension, mon ami. Un vrai plaisir de t’écouter.

Où peut-on se procurer ton album ?


Little Magic Sam

Vous pouvez le commander sur notre site littlemagicsam.com, ou en nous envoyant un message direct sur Instagram ou Facebook. Bandcamp, c’est aussi une excellente option si vous ne voulez pas acheter de CD. Beaucoup de gens n’ont plus de lecteur CD aujourd’hui. Je plaisante souvent en disant que les CD font de très bons dessous de verre ou cadeaux de Noël. Mais vous pouvez aussi acheter la version téléchargement numérique, ce qui soutient le groupe.


Pour un téléchargement de haute qualité, allez sur littlemagicsam.bandcamp.com.


Et si vous ne connaissez pas Bandcamp, c’est une super plateforme pour soutenir les artistes indépendants, surtout à une époque où c’est une bataille quotidienne de simplement faire entendre sa musique. C’est difficile de faire du profit ou de rentrer dans ses frais entre la production et la distribution.


Beaucoup de gens nous demandent si l’album sortira en vinyle, et oui, c’est prévu.


Ken Wallis

Merci beaucoup d’être venu à l’émission, Sam. C’était un vrai plaisir de discuter avec toi.


Little Magic Sam

Merci à toi, Ken. Et merci à tous ceux qui écoutent du Blues. Continuez à le faire vivre, à le découvrir, à le soutenir. Gardons-le en bonne santé !



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